Renault Clio V6 : la petite française devenue supercar de légende
Dans l’histoire de Renault Sport, certaines voitures semblent sorties d’un rêve un peu fou. La Renault Clio V6, c’est exactement ça, une citadine sage transformée en monstre à moteur central arrière, taillée pour le bitume et pour la postérité. En 2001, personne n’en revenait. On avait connu la R5 Turbo dans les années 80, mais la Clio V6 allait encore plus loin. Elle incarnait cette époque où Renault osait tout, quitte à surprendre, choquer, et séduire durablement les amoureux de voitures de collection et de youngtimers.
Crédit photo: Renault
Aux origines du mythe : la folie Renault Sport des années 2000
Au tournant du millénaire, Renault Sport est en pleine confiance. Le constructeur vient d’affirmer sa suprématie en Formule 1 et veut injecter un peu de cette adrénaline dans sa gamme grand public. C’est alors qu’émerge une idée presque absurde, créer une Renault Clio V6 à moteur central, en hommage à la mythique R5 Turbo.
Le projet est confié à Tom Walkinshaw Racing (TWR), le préparateur écossais déjà connu pour son travail sur les Jaguar de compétition. Ensemble, ils vont transformer une citadine populaire en une machine d’exception. Résultat, une carrosserie bodybuildée, des ailes hypertrophiées, et une position de conduite aussi basse qu’une supercar. L’équation était folle : “une Clio avec un moteur de Laguna, mais derrière les sièges.”
Pour les curieux de mécanique, jetez un œil à la fiche technique de la Renault Clio V6
Crédit photo: actu-moteurs
Un moteur central pour une citadine, ou l’audace à la française
C’est sans doute l’une des idées les plus audacieuses de l’histoire de Renault. Au lieu d’un moteur avant, la Clio V6 cache un V6 3.0 litres de 230 chevaux en position centrale arrière. Pour accueillir ce cœur de bête, toute la voiture est reconstruite : châssis, suspensions, voies élargies, freins surdimensionnés.
Résultat, une petite bombe qui passe de 0 à 100 km/h en 6,4 secondes, avec une sonorité rauque à faire trembler les vitres des immeubles. Mais cette architecture radicale a un revers, un comportement difficile, parfois traître. Les premiers essais de la presse sont éloquents, “fabuleuse mais dangereuse.” Une voiture aussi imprévisible qu’une 911 des années 70 sur route mouillée.
Conduire une Clio V6, c’est un mélange d’extase et de frayeur.
Renault Clio V6 Phase 1 : le charme brutal d’une bête indomptable
Produite à Dieppe, mais assemblée en partie au Royaume-Uni, la première génération (2001–2003) est un pur concentré d’excès. Les amateurs de sensations fortes adorent, mais les conducteurs du dimanche sont prévenus, la voiture est brutale. La direction manque de précision, l’arrière décroche sans prévenir, et la répartition des masses (40/60) la rend capricieuse.
Mais c’est justement ce qui forge son mythe. À une époque où les voitures deviennent toutes plus sûres et aseptisées, la Renault Clio V6 offre une expérience viscérale. On la respecte, on la redoute, on l’admire. Un peu comme un fauve qu’on apprivoise sans jamais le dompter.
Crédit photo:Silverstone Auctions Renault Clio V6 Phase II
Phase 2 : la maturité sans renier la folie
En 2003, Renault Sport reprend la main pour corriger le tir. Fini l’assemblage délocalisé : la Clio V6 Phase 2 sort intégralement des ateliers de Dieppe. Le moteur passe à 255 chevaux, le châssis est retravaillé, la suspension affermie, et la voiture gagne enfin en équilibre.
Extérieurement, elle s’affirme, ailes encore plus larges, boucliers redessinés, nouvelles jantes. Elle garde son physique de bodybuilder, mais devient plus exploitable. Les journalistes saluent une voiture enfin “domptable”, sans perdre sa personnalité. Ce n’est plus une bête sauvage, mais un animal bien dressé, sans collier.
Crédit photo:carjager Renault Clio V6 Phase I
Une carrière courte mais une cote d’amour incroyable
Moins de 3 000 exemplaires de la Clio V6 Phase 1, à peine plus de 1 300 de la Phase 2, des chiffres minuscules. Commercialement, c’est un échec relatif. Mais en termes d’image, c’est un triomphe. La Clio V6 devient instantanément un collector.
Sur le marché des youngtimers, les prix grimpent en flèche. Certains exemplaires dépassent désormais les 80 000 €, presque le double de leur valeur neuve. Pourquoi un tel engouement ? Parce qu’elle symbolise quelque chose de rare : une voiture de légende accessible, un morceau d’histoire mécanique à échelle humaine.
Dans les rassemblements, elle attire toujours la foule. Ses proportions, son bruit et son absence totale de compromis la rendent fascinante. Elle n’a pas besoin de badges italiens ou allemands pour impressionner, son simple losange suffit.
Crédit photo: caryouneed
Héritage : une supercar miniature qui n’a jamais eu d’héritière
La Clio V6 fut la dernière Renault à moteur central arrière. Les générations suivantes, même les plus sportives comme la Clio RS, ont préféré rester sages. À l’heure où tout passe à l’électrique, un tel projet semble aujourd’hui impensable.
Et pourtant, cette voiture incarne tout ce qu’on regrette parfois de l’automobile, l’audace, la déraison, la passion pure. À une époque où les constructeurs multiplient les SUV anonymes, la Clio V6 nous rappelle qu’il fut un temps où Renault faisait battre le cœur des passionnés.
Les ingénieurs de Dieppe avaient voulu créer une icône, ils ont réussi. Elle n’a pas d’héritière, mais elle a des descendants spirituels : toutes ces sportives modernes qui tentent, sans toujours y parvenir, de faire revivre cette émotion brute.
Conclusion
La Renault Clio V6 restera comme une anomalie merveilleuse dans l’histoire de l’automobile française. Elle a prouvé qu’une voiture populaire pouvait devenir une supercar sans renier son âme. Elle a rappelé que le luxe, ce n’est pas le prix, mais l’émotion.
Aujourd’hui, chaque démarrage de Clio V6 sonne comme un manifeste contre la fadeur du monde moderne. Une petite française au grand cœur, qui rugit encore dans la mémoire collective.
Nota Bene :
La Renault Clio V6, c’est un rêve mécanique devenu réalité. Une voiture née d’un excès d’audace, devenue légende malgré sa rareté. Un rappel vibrant qu’en matière d’automobile, la passion ne se calcule pas en chevaux, mais en frissons.
À lire aussi : Lancia Delta Integrale : la légende du rallye et de la route