Péage sans ticket : bientôt la norme sur toutes les autoroutes ?
Sur l’autoroute, le ballet des barrières et des tickets papier pourrait bientôt appartenir au passé. Depuis quelques mois, les tests de péage sans ticket se multiplient, notamment sur l’A13 et l’A79. Objectif ? Gagner du temps, fluidifier le trafic… et surveiller sans lever le nez. Ce nouveau système, inspiré de modèles déjà en place dans d’autres pays européens, promet plus de simplicité. Mais est-ce vraiment le cas pour tout le monde ?
Crédit photo: turbo
Péage sans ticket : de quoi parle-t-on exactement ?
Concrètement, le péage sans ticket fonctionne sans barrières, sans bornes, sans arrêt. À l’approche d’un ancien péage, des portiques équipés de capteurs et de caméras à lecture automatique de plaques (LAPI) identifient les véhicules. Ensuite, deux options :
- L’automobiliste dispose d’un badge de télépéage, et le passage est enregistré automatiquement.
- Il n’a pas de badge, auquel cas il doit se connecter dans un délai imparti (en général 72h) sur un site internet pour régler son passage, à l’aide de sa plaque d’immatriculation.
Ce système supprime donc les bornes à tickets, les guichets, et les barrières mécaniques. En clair, on ne s’arrête plus, ce qui évite les ralentissements, surtout lors des grands départs.
Crédit photo: sixt Autoroutes concernées en 2025
Les autoroutes concernées en 2025
La première à avoir sauté le pas est l’A79, entre Montmarault et Digoin, sur un tronçon d’environ 80 kilomètres. Depuis fin 2022, elle fonctionne sans aucune barrière, avec uniquement des portiques de contrôle. Le résultat est concluant : une circulation plus fluide, des économies de carburant, et moins d’émissions de CO₂ dues aux arrêts et redémarrages.
L’A13 et l’A14, entre Paris et la Normandie, sont les prochaines sur la liste. Les travaux sont en cours, avec une mise en service progressive du péage sans ticket d’ici fin 2025. À terme, plusieurs autres axes pourraient suivre : certaines sections de l’A4, de l’A10 ou encore du contournement Est de Lyon sont à l’étude.
Un changement présenté comme une simplification
Sur le papier, c’est simple : plus de file, plus de ticket à perdre, plus besoin de chercher sa carte bancaire ou de parler à une borne qui bug. La conduite est continue, sans coupure. C’est comme mettre le régulateur sur “zéro stress”.
Mais dans la pratique, cela suppose aussi un apprentissage. Les usagers doivent s’adapter : penser à payer en ligne, vérifier que leur plaque est bien lisible, accepter d’être suivis à la trace. Car le système enregistre l’heure, le lieu, la plaque. Le trajet n’est plus seulement une route parcourue, c’est aussi une donnée collectée.
Crédit photo:wikipedia Portique d’entrée
Et pour les voitures étrangères ?
C’est la grande question que tout le monde se pose. Comment un touriste espagnol, belge ou allemand saura-t-il qu’il doit payer en ligne ?
Les sociétés d’autoroute affirment avoir prévu le coup : des panneaux multilingues, une appli traduite, et la possibilité de payer sur des sites comme « péage-sans-barrière.gouv.fr » dans un délai de 72h. Mais dans les faits, la communication reste floue. Et les risques de non-paiement sont élevés. En cas d’oubli, les frais explosent : jusqu’à 90 € de pénalité pour quelques euros de péage.
Pour éviter trop de cafouillages, certains axes très fréquentés par les étrangers conservent encore des bornes physiques ou des centres d’appel multilingues. Mais il est évident que d’ici quelques années, tout sera dématérialisé.
Crédit photo:que choisir
Les critiques : surveillance, bugs et sanctions automatiques
Les défenseurs de la vie privée s’alarment : en supprimant les tickets, on augmente la traçabilité. Le moindre passage devient une ligne dans un tableau. Et l’erreur n’est pas toujours humaine… mais elle coûte quand même.
Des bugs de lecture de plaque, des confusions entre véhicules, des mauvaises saisies peuvent entraîner des amendes injustifiées. Les automobilistes doivent alors prouver leur bonne foi, parfois des semaines après leur passage. Comme si l’oubli d’un paiement devenait une infraction automatique.
Et au-delà du paiement, c’est aussi le flicage qui inquiète. Un réseau de caméras sur tout le territoire, capable de suivre chaque trajet, chaque voiture, chaque minute ? On est loin du simple péage.
Crédit photo:peage-flux-libre.gouv.fr
Faut-il s’y habituer ? Tout indique que oui
Qu’on le veuille ou non, le péage sans ticket semble promis à un bel avenir. La France rattrape ici son retard sur l’Espagne, l’Italie ou le Portugal, où des systèmes similaires sont en place depuis plusieurs années.
D’un point de vue économique, les sociétés d’autoroute y trouvent leur compte : moins de personnel, moins de maintenance, plus de données à valoriser. Pour l’État, c’est aussi un levier de modernisation.
Reste à savoir si les automobilistes suivront. Car un changement aussi structurel que la disparition du ticket papier ne se fera pas sans accrochage. Mais dans cinq ans, on en rira peut-être en repensant à ces petits tickets froissés qu’on cherchait sous le siège au moment de payer.
Conclusion
La disparition du ticket papier peut sembler anecdotique, mais elle annonce un changement plus profond : l’automobile entre dans une ère de circulation automatisée, fluide… mais plus surveillée. À chacun de voir si le progrès vaut la transparence. Ce qui est certain, c’est que les portiques sont en place, et que les barrières se lèvent… pour ne plus jamais redescendre. Et pour les gestionnaires d’autoroute, c’est tout bénéf’ : le conducteur ne s’arrête plus, il ne sort plus sa carte, et il ne réalise parfois qu’il a payé… que trois jours plus tard.
Nota Bene
Plus besoin de baisser la vitre, mais pas question d’oublier de payer. Le péage devient invisible, mais pas facultatif. Et pour les étourdis, les sanctions pleuvent à vitesse d’autoroute.
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