Grèves SNCF : une tradition plus solide que le rail
On ne sait pas vraiment ce qu’il se passe en ce moment à la SNCF. Grève, préavis de grève, menace de grève ? Qu’importe. À force, ce n’est plus un événement, c’est l’arrière-plan sonore de la vie française. Une bande-son bien huilée, entre le TGV de 7h41 supprimé pour “mouvement social” et l’intercités de 18h04 annulé pour “personnel non disponible”. Classique.
Depuis que je suis gamin, les grèves SNCF sont là. Comme les saisons. Une sorte de rituel national qui revient toujours, avec ses bulletins radio alarmants, ses voyageurs résignés et ses syndicats qui montent au front comme à la Belle Époque. On peut ne pas suivre l’actualité pendant deux mois, revenir et tomber sur un bandeau “grève SNCF : fortes perturbations à prévoir”. On est chez nous.
Et pourtant, les cheminots sont, si l’on en croit les fiches de paie publiées ici ou là, plutôt bien lotis comparés à la moyenne nationale. Certes, ils ont des contraintes. Certes, des horaires décalés. Mais est-ce si exceptionnel ? Infirmières, chauffeurs de bus, boulangers… Tous bossent tôt, tard, en horaires brisés. Eux ne bloquent pas les rails tous les trimestres.
Alors pourquoi cette exception permanente ? Pourquoi la SNCF semble-t-elle appartenir à un autre monde, à une autre logique sociale ? Parce qu’on l’a laissée s’enfermer dans un modèle où la négociation n’est qu’un sas avant le conflit. Un modèle où le moindre désaccord déclenche un préavis, où la défense d’acquis devient un sport de compétition.
Et si on sortait du tunnel ?
Une réforme profonde, soumise à référendum. Pas pour casser un service public. Pour le repenser. Mettre tout à plat, faire voter les usagers, les citoyens. Les syndicats n’auraient pas grand-chose à dire si 60 % des Français disent : “on en a marre”. Et on peut déjà imaginer le score…
Car ce n’est pas une question idéologique. C’est une question de fatigue. Une lassitude généralisée, un ras-le-bol discret mais massif. Ceux qui prennent le train tous les jours n’osent même plus râler. Ils subissent, adaptent leur agenda, triment en silence. Et parfois, ils finissent par se dire que la voiture, c’est pas si mal.
Nota Bene
Comme un vieil autorail sur une voie de service, le débat sur les grèves SNCF reste là, à l’arrêt. Mais à force de secouer les wagons, un jour ou l’autre, les passagers finissent par descendre.
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