Grandes surfaces : quand même les jours fériés ne comptent plus
Aujourd’hui, c’est lundi de Pâques. Une fête, un jour férié, un moment supposé de pause, de temps pour soi, pour sa famille, ou pour rien — ce qui est déjà beaucoup. Et pourtant, ce matin, comme un dimanche d’alerte orange, les grandes surfaces ont ouvert leurs rideaux. Une ouverture « exceptionnelle » qui ne l’est plus tant que ça.
Mais à quoi bon ? Personne ne manquait de pâtes ou de chocolat. Ce n’est pas une tempête qui se prépare, ni une ruée avant confinement. C’est juste… un lundi de plus, pour continuer à gratter quelques parts de marché. Pour amortir la chute d’un modèle commercial qui vacille.
Parce que c’est bien là le fond du problème : les hypermarchés s’essoufflent. Ils sont trop grands, trop loin, trop vides, et surtout trop déconnectés. La grande distribution, longtemps arrogante et intouchable, sent aujourd’hui le souffle du changement dans la nuque.
Une fréquentation en baisse lente mais continue
On le voit dans les chiffres. La fréquentation des grandes surfaces baisse d’année en année. Ce ne sont pas des revers spectaculaires, mais une lente érosion. Les consommateurs désertent les temples du plastique et de la promo éternelle. Ils préfèrent la proximité, les circuits courts, les producteurs réels plutôt que les labels creux.
Et le « bio » des grandes surfaces n’y fait rien. Trop industriel, trop standardisé. Les consommateurs en veulent un vrai, celui qui a un visage, une histoire, une terre.
Résultat : les grandes surfaces jouent la carte du « toujours ouvert ». Dimanche matin, jours fériés, soirées prolongées. Elles tentent de compenser la perte d’attrait par une présence constante. Mais être ouvert plus longtemps, c’est vendre à des horaires creux. Et c’est une fuite en avant.
Un monde à l’envers
On en arrive à un paradoxe : les petits commerces restent fermés, respectent les jours fériés, tandis que les mastodontes ouvrent en grand. Le pot de fer contre le pot de terre, mais inversé. Ce qui était censé être une « exception » devient la norme. Ce qui relevait d’un service devient une obligation.
Et pendant ce temps-là, les salariés suivent. Certains contents d’avoir une prime, d’autres contraints de se plier à la logique de leur employeur. Le progrès, nous dit-on. Le progrès de pouvoir acheter des chips à 9h un lundi de Pâques, alors qu’on ne sait plus ce qu’on fête.
Un modèle en bout de course
En réalité, cette ouverture en dit long : elle est le symptôme d’un modèle à bout de souffle, pas d’une modernité triomphante. Si les grandes surfaces devaient encore séduire, elles n’auraient pas besoin de forcer leurs portes.
L’urgence de sauver des points de marge se heurte à une évidence : les gens changent. Ils cuisinent différemment, consomment autrement, se méfient. Ils veulent du sens, pas du volume. Et ce n’est pas en bradant du saumon labellisé que la grande distribution regagnera leur cœur.
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